Une
Tribune du Secrétaire du SMP CGT Sud Gironde
La
Réole, le 22 janvier 2018
Nous sommes des militants
révolutionnaires menant une activité syndicale, délégués ou non,
dans les entreprises du privé. Parfois, l’état consternant des
sections syndicales de nos entreprises nous empêche même de nous
syndiquer ! Nous sommes éparpillés dans les fédération et
confédérations dont nous n'apprécions pas souvent l’orientation,
Pourtant, nous sentons que les temps
changent, que faire ? quelle perspective syndicale défendre ?
renforcer telle confédération ? Pousser à la création de nouveaux
syndicats radicaux ? Structurer des oppositions syndicales un peu
partout ? Participer à des regroupements, et lesquels ? Organiser le
travail intersyndical ? Prendre
de plein droit nos responsabilités au sein des appareils syndicaux ?
Il n’est pas
difficile d’y voir clair, il n’est pas plus trop tôt pour
débattre, proposer et lutter dans ce sens… Nous considérons que
rejoindre le Front
Social n’est pas
qu’une alternative crédible, elle est crédible mais aussi
justifiée et sérieuse.. Il ne faut pas laisser la confusion
s’installer et profiter aux dirigeants syndicaux, de toutes
tendances et qui nous ont entraîné dans un mouvement ouvrier dans
l’état dans lequel on le trouve aujourd’hui. A l’heure où de
nouveaux syndicats SUD se constituent régulièrement sans vraiment
d’orientation ; à l’heure où la CFDT s’assume partenaire du
gouvernement et du MEDEF, où FO est plus que jamais divisé et
abandonné par ses bases et que le “
recentrage de la CGT se précise ?? “,
le moment est venu de confronter nos points de vue et nos
perspectives, de tracer les grandes lignes d’un syndicalisme de
classe.
La
CGT que nous voulons ne doit plus avoir peur de produire de l’utopie,
sinon le patronat est le seuil fournisseur d’utopie !! Qu’est ce
que la loi Macron, si ce n’est l’utopie des patrons d’il y a
quarante ans ??
Un
syndicalisme de classe
L’exploitation et le capitalisme
sont au cœur de la société actuelle. Lutter pour leur abolition
doit être le fil directeur de l’action syndicale. Il ne s’agit
pas pour nous de combattre seulement tel ou tel excès
particulièrement odieux, mais de remettre en cause l’exploitation
de l’homme par l’homme. En ce sens, le syndicalisme de classe est
celui porté par la classe ouvrière, les exploités du privé comme
du public, producteurs de toutes les richesses et dépossédés de
tout pouvoir sur leur vie.Peut-être aujourd’hui la classe ouvrière
est-elle en retrait des combats partiels, affaiblie et désorganisée
par des années de restructurations et de combats perdus contre les
licenciements et le chômage. Il n’empêche en Belgique, au
Portugal, au Brésil en Espagne ou en Argentine, comme en Corée du
Sud ou en Turquie, le combat de la classe ouvrière mondiale est
toujours vivant. Son développement numérique en Chine et en Asie du
Sud-Est est riche de possibilités à venir. C’est elle qui est au
cœur de la société et des transformations futures, et tout projet
syndical qui ne s’organise pas autour d’elle ne peut déboucher
que sur la conciliation avec les intérêts de la bourgeoisie. Aussi,
il ne s’agit pas d’une déclaration de principes, mais d’un
critère essentiel pour s’orienter dans toutes les luttes et débats
en cours autour de la recomposition :Nous rejetons les mots d’ordre
ouvertement nationaliste comme le «produisons français» ou au
chauvinisme camouflé comme «développement industriel ». Nous
refusons la défense de son entreprise ou de son pays au nom de la
défense des emplois. Contre la solidarité de certains syndicats
avec le Medef et gouvernements successifs, nous défendons une ligne
de construction de l’unité entre travailleurs de différentes
entreprises, de différents pays. Nous refusons, de même, de parler
de la « défense des usagers » ou du « Service Public » et nous
mettons en avant la défense des
intérêts
des travailleurs et des secteurs populaires
dans l’accès aux soins, à l’éducation, aux transports… Nous
disons que ce critère de classe nous sert de boussole pour savoir
qui l’on privilégie dans le travail syndical. Dans la grande
industrie comme dans le secteur public, notre priorité de travail
doit être d’organiser les ouvriers et de construire, sur la base
de leurs intérêts de classe, des revendications qui unifient
largement contre le patronat et l’Etat. A l’inverse, nous nous
opposons à un certain syndicalisme qui vise à mettre les ouvriers à
la remorque de l’aristocratie ouvrière, des cadres, voire des
patrons.
Un
syndicalisme de solidarité
Il ne s’agit pas là d’un critère
qui s’impose naturellement. Tout le monde se prétend aujourd’hui
« solidaire », pour l’unité. Le
«
Tous ensemble ! »
n’est-il pas le mot d’ordre partagé dans toutes les
manifestations ? Mais
ensemble
pour quoi ? Solidaires en quoi ?La
première des solidarités de classe est celle à l’égard de nos
camarades immigrés, avec ou sans papiers, souvent les plus précaires
des travailleurs. Ils
sont marginalisés dans l'activité des confédérations ! Nous
rejetons sans détour le nationalisme. Pour reprendre un des plus
vieux mots d’ordre du mouvement ouvrier :
« les prolétaires n’ont pas de patrie ».
Combattre le chauvinisme et le racisme dans l’entreprise et en
dehors est plus important que jamais en ces périodes troublées où
le racisme maintient son influence parmi les travailleurs.
Cette solidarité n’est donc pas
seulement « européenne », même si les conditions de combat
relativement proches rendent les liens plus faciles. Certains
discours visant à légitimer la Confédération Européenne des
Syndicats (CES), cette institution de l’Europe impérialiste,
recouvrent en fait un chauvinisme européen en formation derrière un
internationalisme de façade. Cette CES qu’on nous vante dans les
confédérations, n’est qu’une structure de technocrates de la
relation sociale qui cherchent à se poser en interlocuteurs très
responsables face à la Commission Européenne. D’où l’appel à
vote Oui au référendum du 29 mai 2005, en France, repris par la
CFDT et toute une fraction de la direction CGT, finalement mise en
minorité, il faut le savoir et le dire !! La
solidarité de classe que nous visons, concerne les travailleurs du
monde entier, en particulier ceux des pays dominés, des pays
d’origine de l’immigration. Pour cela nous rejetons toute forme
de « préférence nationale » ou « européenne » et en
particulier nous revendiquons l’ouverture de l’embauche des
étrangers dans la fonction publique... …
ce qu’ oublient de faire tous ceux qui défendent, en l’état, le
statut des fonctionnaires… n’est ce pas ??La
construction de l’unité de classe suppose le combat contre le
racisme, mais aussi contre le sexisme. Temps partiel imposé,
discrimination salariale, discrimination à l’emploi sont le lot
des femmes travailleuses. Comme
sur les questions de l’immigration, il ne faut pas hésiter à
aller à contre-courant des idées dominantes dans le syndicat.
Le combat d’ensemble ne doit pas se
faire en camouflant les situations particulières mais en intégrant
la lutte contre les divisions que le patronat et l’Etat nous
imposent.
Construire une solidarité de classe,
c’est aussi la construire avec les chômeurs et les précaires.
Nous rejetons le syndicalisme élitiste qui conditionne la
titularisation des précaires au passage de concours. Dans le secteur
public comme dans le secteur privé, nous devons nous battre pour
l’embauche immédiate et sans condition des précaires qu’ils
soient intérimaires, vacataires ou CDD. De même, la solidarité
avec les sous-traitants de toute sorte, multipliés par suite des
découpages juridiques opérés par les patrons, est indispensable
pour reconstruire un syndicalisme qui organise tous les secteurs
d’activité. Travaillons
avec les privés d’emploi à construire un syndicalisme faisant
converger en une même lutte celle des travailleurs sans emploi et
des travailleurs avec emploi, par exemple contre l’intensification
du travail. La
solidarité c’est aussi le souci de sortir le nez des situations
locales. S’il nous
faut défendre pied à pied les intérêts immédiats des
travailleurs dans les entreprises, nous ne pouvons nous satisfaire
des petits rapports de force établis çà et là, souvent sur des
bases étroites et locales. Le syndicalisme de classe ne se
définit pas seulement à l’échelle de l’entreprise, voire du
délégué. Il existe parce qu’il se situe par rapport à tous les
enjeux syndicaux, nationaux et internationaux, contre les
orientations portées par les directions confédérales. Pour cela,
nous devons saisir autant que possible les occasions pour mettre en
contact nos syndicats avec des travailleurs d’autres sites,
d’autres entreprises, d’autres pays. Même si les retombées
pratiques sont souvent faibles en terme de lutte commune, les
conséquences sont généralement positives dans la prise de
conscience des enjeux chez les syndiqués. Enfin, nous ne nous
satisfaisons pas d’une solidarité « contre »... (contre
le gouvernement du moment par exemple)
qui cache souvent un « chacun pour soi », solidarité des
mécontents qui évite d’affronter les corporatismes et les
contradictions qui existent parmi les travailleurs. La solidarité
que nous voulons est positive, «
pour » la défense
des intérêts de classe des travailleurs. Cela suppose débat et
avancée, convergence sur un projet commun qu’il nous faudra bien
définir mais surtout pas
un syndicalisme
jaune, qui refuse la politique de classe pour mieux collaborer avec
le patronat, ce que font la plupart des syndicats qui s'appellent
eux-mêmes « indépendants » ?? Au contraire, nous voulons un
syndicalisme totalement indépendant du capital et de l’Etat, qui
ait rompu tous ces liens entretenus depuis des décennies par des
bureaucrates qui partagent maintenant la logique de nos
exploiteurs.Nous refusons le syndicalisme qui rentre dans la défense
de l’entreprise et de la nation, qui se prétend meilleur
gestionnaire qu’un patron incompétent, qui propose contreplan sur
contreplan, qui s’échine à chercher les moyens de financer nos
revendications et enchaîne ainsi les travailleurs aux règles de
l’économie capitaliste. Face aux restructurations nous défendons
l’intérêt des travailleurs, et rien d’autre. Dans les
structures syndicales économiques institutionnelles (Comités
d’Entreprise, Conseil d’Administration, Commissions
Paritaires...) nous refusons de rentrer dans le débat gestionnaire
pour dénoncer au contraire les règles qui en régissent le jeu.
Nous refusons le syndicalisme institutionnel de partage des tâches
entre syndicats et patronat. Nous refusons un syndicalisme qui gère
cantines, mutuelles, chômage et sécurité sociale, syndicalisme qui
n’a apporté que corruption matérielle et idéologique dans nos
rangs. On ne peut pas en même temps dénoncer le capitalisme et
prétendre en être les meilleurs gestionnaires, voire de dignes
représentants patronaux comme on a pu le voir dans certains
CE...Nous refusons de négocier l’embauche ou les licenciements des
ouvriers, de cogérer la carrière de nos collègues, comme dans
l’Education Nationale. Nous refusons le syndicalisme institutionnel
de « partenaire privilégié », le syndicalisme de clientèle, le
syndicalisme de service, pour privilégier celui de la lutte de
classe ! Notre syndicalisme est celui de l’indépendance de classe,
qui définit ses objectifs par rapport aux intérêts des
travailleurs, et d’abord les plus exploités. C’est pour cela
que nous proposons des revendications considérées « utopiques » …
et que nous refusons le mot d’ordre « Interdiction des
licenciements dans les entreprises qui font des profits et qui
licencient ». Ce mot d’ordre, initié par Lutte Ouvrière puis
repris par la plupart des forces politiques et syndicales, fait
dépendre nos objectifs de la bonne santé de l’entreprise et
laisse sur le carreau les travailleurs des entreprises perdantes dans
la guerre économique ainsi que tous les sous-traitants. C’est
ainsi que doit se construire notre camp, l’orientation syndicale de
classe nécessaire à l’avenir des travailleurs.
Un
syndicalisme véritablement collectif et démocratique
Nous en avons
assez de ces délégués qui parlent en notre nom et utilisent notre
force dans les combats au service des intérêts particuliers de
quelques uns, qui signent des accords inacceptables ou nous prêchent
la division du corporatisme ou du nationalisme. Nous
voulons contrôler nos combats et notre action syndicale. Dans les
conflits, nous voulons organiser comités de grève et assemblées
générales, un contrôle collectif et permanent sur notre mouvement
pour décider nous-mêmes de notre action. Mais nous avons aussi
besoin d’organisations, de véritables syndicats qui nous
représentent en permanence. Le syndicalisme n’est pas que la
grève, c’est aussi l’éducation, l’organisation permanente des
plus larges masses sur une orientation bien claire contre
l’exploitation capitaliste.Contre
l’individualisme qui imprègne toute la société capitaliste, le
syndicalisme c’est aussi un moyen de préparation à la
transformation de la société. C’est une école de solidarité,
de lutte, de prise de conscience par l’apprentissage permanente
d’autres relations et fonctionnements:
l’apprentissage des décisions collectives, le partage des
responsabilités et de la distribution des tâches, la rotation des
dirigeantes de l’organisation. Pour cela nous avons besoin de
délégués, de représentants, de mandats, de modes de contrôle.
Nous avons besoin
d’avantage d’Unions Locales, de structures interprofessionnelles
( MultiPro ), du fédéral et d'organisations internationales. La
vie syndicale ne peut se mener sans une telle structuration !! Le
problème n’est pas d’avoir des représentants, mais de savoir
les choisir sur des bases claires et explicites, de pouvoir
lessoutenir en permanence, jusqu'à remettre en cause leur mandat,
d’élaborer collectivement (et non à partir de quelques experts,
aussi syndicaux soient-ils) une orientation de classe. La
démocratie syndicale est à réinventer et destinée à combattre
l'ennemi bien mieux organisé que nous !! Nous
défendons l’idée d’un syndicalisme de classe ; mais nous
voulons aussi construire un syndicalisme de masse. Notre ambition est
de construire un syndicalisme de classe majoritaire parmi les
travailleurs. Nous pensons même que, dès aujourd’hui, il est
possible d’organiser une fraction significative de la classe
ouvrière et de l’ensemble des travailleurs autour d’un
syndicalisme dynamique, radical, de rupture avec la société
capitaliste. Pour cela, nous
refusons le syndicalisme élitiste de quelques avant-gardes. Nous
refusons, en particulier, de confondre organisation syndicale et
organisation politique. Nous
connaissons bien ce phénomène quand des structures CGT appellent à
voter pour le député-maire du coin !!. Il
existe aussi chez certains militants d’extrême gauche qui
utilisent le syndicat comme une simple couverture pour le travail de
construction de leur organisation politique. Mais le problème existe
aussi chez un certain type de militantisme anarcho-syndicaliste qui
confond les tâches entre ces deux types d’organisations et
cherchent à ce que le syndicat prenne des positions extrêmement
radicales sur des sujets variés, sans tenir compte de leur base et
de la nécessité d’un syndicalisme de masse.
Les démarches ne sont pas les mêmes.
Un Parti politique se constitue autour d’un programme de
transformation de la société que seule une crise révolutionnaire
permettra d’accomplir. Dans les luttes, il tend, et c’est normal,
à raccorder les manifestations de protestation à son projet
politique. Le syndicat, lui, doit organiser la
défense quotidienne des travailleurs contre les empiétements du
capital. Il a besoin de l’énergie et de la solidarité de toute la
classe, il n’organise pas une avant-garde. Et sa façon d’aborder
la politique est conditionné par ce point de départ. Le syndicat
est amené à faire de la politique, à prendre position sur les
grands problèmes : les attaques de la bourgeoisie bien sur, la
nature de la production , la sécurité et l'environnement, la
domination impérialiste etc.. Mais il est forcément limité dans
son expression proprement politique à ce que peuvent assumer les
syndiqués. Cela n’interdit
pas, bien au contraire, l’activité de militants politiques
révolutionnaires dans les syndicats. Ils apportent leurs analyses,
leur compréhension, leurs propositions, précisément parce que le
syndicat doit devenir une école de classe pour la libération des
travailleurs. Mais ils se soumettent au débat démocratique et
respectent les décisions prises solidairement. Voilà les grands
axes sur lesquels, pensons-nous, doit se construire aujourd’hui un
courant syndical de classe, en les défendant dans toutes les
structures dans lesquelles nous sommes investis. C’est le socle, le
point de départ d’un syndicalisme de classe, quelles que soient
les situations particulières dans lesquelles nous nous trouvons les
uns et les autres. Nous sommes tout à fait conscients que c’est
insuffisant, que cela ne définit pas une orientation, une tactique,
des choix syndicaux. Mais il faut en passer par là sans brûler les
étapes, accepter de jeter à nouveau les fondations de nos
organisations de lutte, contre toutes les pseudo évidences serinées
par des bureaucrates intéressés. C’est
ce que nous proposons de débattre le plus largement possible et
d'utiliser comme un outil pour construire un renouveau syndical...
avec
Le Front Social.
Le Secrétaire du SMP CGT Sud Gironde
José BENGALA
Syndicat
MultiPro CGT Sud-Gironde –
Mairie
de la Reole – 1, esplanade Charles de Gaulle – 33190 La Reole
contact@syndicat-cgt-multiprosg.org
Janvier
2018
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